dimanche 22 mars 2015

Ariane.

Une nouvelle que la Libellule présente à un concours de l'académie de son lycée, Lettres Vives , sur le thème de l'orientation :3 la Libellule n'a pas trop l'habitude des récits, donc votre indulgence elle implore et vos avis bienvenus sont.
La Libellule a écrit cette nouvelle en écoutant en boucle la jolie chanson "T'es belle", de Volo, donc si ça vous arrange vous pouvez l'écouter aussi en la lisant :)

 « Autour de moi, les rires bruissent, les mots filent, et une musique insouciante un peu vide s'articule. Je ne connais pas forcément très bien la fille qui m'a invitée, mais elle est plutôt sympa, en tout cas elle a beaucoup d'amis, on est au moins une vingtaine à être venus. Je ne connais pas grand monde. Elle a une jolie maison Jeanne, très mignonne avec ses pierres anciennes, son lierre, ses grandes fenêtres. Et là c'est vraiment beau, avec les lumières acidulées qui donnent un aspect gai, léger, vif.

Je n'ai jamais été quelqu'un d'extraverti, sans être coincé ; quelqu'un d'un peu moyen, pas gris mais transparent. Et même si j'aime bien Jeanne, je n'aime pas danser et je n'aime pas les fêtes où je ne connais pas grand monde.
M'adossant au mur, je commence à me demander ce que je fais ici.
-Salut.
-Heu, salut.
Une drôle d'inconnue s'est glissée près de moi. Elle est belle. C'est vrai, elle est juste sublime cette fille avec son visage délicat, sa bouche cerise, sa peau pâle. Elle est belle et bizarre aussi. C'est vrai, personne n'accoste les autres comme ça.
-Ça va?
-Normal et toi?
"Normal mais bien sûr, c'est normal comme situation, je ne te connais pas, tu ne me connais pas et tu me demandes comment ça va comme si j'allais te répondre honnêtement."
Je ne sais pas si je devrais être agacée ou fascinée par cette personne.
- Ça va. Je te dérange pas? C'est juste que je connais personne, et vu que t'avais l'air seule toi aussi...
-Non non mais t'inquiète, y'a aucun problème !
-Cool. (et là elle me fait un grand sourire et ses encore plus grands yeux sombres en pétillent ; la scène est... irréelle) On fait connaissance? Parce que là je m'ennuie franchement, et je suis sûre que toi aussi, et j'adore parler avec les gens.
J'éclate de rire.
Finalement on discute toute la soirée et j'apprends tout un tas de trucs sur cette étrange fille. Elle s'appelle Ariane, elle vit avec sa mère, elle est bilingue français/anglais, elle connaît Jeanne du collège, on écoute le même genre de musique, elle a un rire incroyable, elle est très drôle, elle est très très belle et elle danse très très très bien (mieux que moi en tout cas). Finalement je passe une bonne soirée. Finalement on échange nos numéros. »

« 1 – Ariane joue de la guitare.
2 – Ariane aime la nuit.
3 – Ariane voudrait tomber amoureuse d'un garçon qui s'appellerait Jimmy, à cause de Jimmy Page et de Jimmy Hendrix, parce que bon quand même, ça ne peut PAS être un hasard.
4 – Mais Ariane n'est jamais tombée amoureuse.
5 - Ariane rit très fort mais d'un rire léger.
6 - Ariane aimerait vivre dans un voilier et monter une radio pirate (comme dans Good morning England).
7 - Ariane est un peu mégalomane.
8 - Ariane n'a pas beaucoup d'amis.
9 - Mais Ariane dit qu'elle s'en fout.
10 - Ariane connaît un nombre incroyable de chansons par coeur.
11 - Ariane n'a jamais vu Titanic. (mais ça on s'en fout parce que Titanic c'est nul)
12 - Ariane n'a (d'ailleurs) pas envie de le voir.
13 - Ariane chante très bien.
14 - Même si Ariane fume un peu.
15 - Ariane fume juste un peu.
16 - Ariane est parfois agaçante.
17 – Ariane refuse de grandir.
18 – Ariane est belle.
19 – Ariane écrit beaucoup.
20 – Ariane écrit beaucoup très bien.
21 – Ariane montre rarement ce qu'elle écrit.
22 – Par contre Ariane dit tout le temps qu'elle joue de la guitare.
23 – Ariane est mal dans sa peau même si elle le cache beaucoup très bien.
24 – Ariane est dure à cerner.
25 – Ariane a déjà écouté Stairway to heaven à l'envers.
26 – Ariane est immature (mais on a l'impression qu'elle le fait exprès pour être heureuse).
27 – Ariane donne l'impression d'avoir tout vécu.
28 – Ariane boit du thé.
29 – Ariane est fascinée par beaucoup de trucs.
30 – Ariane est jolie.
31 - Ariane est lumineuse.
32 – Ariane est frivole.
33 – Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui ressemble à Ariane.
34 – Ariane me donne l'impression d'être une personne différente. (parce qu'elle l'est, elle)
35 – Ça fait du bien de se sentir une personne différente.
36 – Je ne comprends pas ce qu'une fille comme Ariane me trouve.
37 – Mais Ariane dit qu'elle n'a jamais rencontré quelqu'un qui me ressemble.
38 – Et qu'elle ne comprend pas ce que je lui trouve.
39 – Ariane aurait aimé être rousse avec d'immenses yeux verts.
40 – Ou bleus.
41 – Ariane cherche partout le nombre 42 parce qu'elle a lu dans un bouquin de Science Fiction que ça symbolisait le sens de la vie.
42 – Ariane, c'est le sens que j'ai choisi à la mienne. »

Des chercheurs d'un peuple hyper-intelligent et pan-dimensionnel construisirent le deuxième plus grand ordinateur de tous les temps, Pensées Profondes, pour calculer la réponse à la grande question sur la vie, l'univers et le reste. Après sept millions et demi d'années à réfléchir à la question, Pensées Profondes fournit enfin la réponse : « quarante-deux ». Douglas Adam

« Au début, on se parlait un peu par SMS. On était toujours d'accord l'une avec l'autre, ou le point de l'autre semblait juste, intelligent. On riait, s'accordait. On a commencé à se voir de plus en plus souvent, on allait au cinéma, rire, faire un peu n'importe quoi, rien n'était méchant mais tout était bête (et drôle). Ariane a pris de plus en plus de place dans ma vie, dans mon esprit, dans moi. En trois mois, presque toute la place, en fait. J'ai jamais été aussi proche de quelqu'un, c'est fou. Cette fille est géniale. J'ai l'impression de l'avoir toujours connue. »

« Quelques notes résonnent, le début de Stairway to heaven (joué à l'envers). La mélodie s'arrête. C'était beau, délicat. La voix est émue, comme ailleurs.
-Je t'aime.
-Hein, qu'est ce que t'as dit?
-Euh non rien, laisse tomber.
-J'ai entendu tu sais.
-...
-...
-Allô? Allô? Aria... Ariane?
La voix se brise ; un sanglot. »

« Je veux plus te voir, tu me dégoûtes. Tu m'as trahie. Pourquoi tu m'as pas dit que t'étais lesbienne? Tu me déçois. Tu me déçois et tu me fais mal. »

« Pauvre conne. »

« A cet instant là, quand je l'ai entendue jouer, je l'ai imaginée. Splendide, son regard un peu rêveur, son petit sourire malicieux, ses longs doigts délicats, et je me suis souvenue de la première chose à laquelle j'ai pensé en la voyant « elle est belle cette fille » et je l'ai pensé, elle est belle cette fille. Elle est tellement belle.
Et alors ça m'a paru tellement évident. Et alors j'ai compris. Et alors je l'ai dit. »

Elle doit avoir une vingtaine d'années. Elle parcourt les pages qu'elles a étalées sur le bureau. Un peu poussiéreuses, celles ci semblent dater d'au moins cinq ans. La barque d'un sourire triste se dessine sur son visage aux joues rebondies, ses doux yeux noisettes se teintant d'une mélancolie furtive.
Elle prend un stylo sur le bureau un peu trop petit, saisit une feuille, commence à écrire.

« Il paraît qu'on oublie jamais le premier amour. La première vraie personne, celle qui fait vibrer, celle qui crache des étoiles, qui parsème des soleils négligemment. La première qui peut briser fort, la première qui peut tisser les illusions, jouer et se jouer du temps, la première qui fait l'univers se séparer en deux : elle, et le reste semblant tout d'un coup bien fade. Je me souviens de cette fille, de toutes ces petites manies, de sa façon de sourire, de chanter, de parler de tout et de rien avec une égale intensité, une égale passion. En tout cas c'est comme ça que je le ressentais.
C'est drôle qu'elle se soit appelée Ariane, ça rappelle cette bizarre expression, « orientation sexuelle », pas si bizarre finalement. Parce qu'Ariane, elle m'a sortie d'une sorte de labyrinthe de doutes.
Le premier amour, c'est comme sortir d'un carcan, d'un labyrinthe, ça induit qu'il y a quelque chose après, quelque chose ensuite. J'ai vécu au fil d'Ariane, au fil de ses journées, de ses actes. De son rire, de ses mots, de ses notes, de son aura, de ses cheveux, de ses mains, de sa peau, de son humour. Finalement, j'ai saisit ce fil pour m'extirper d'un labyrinthe.
Je me demande qui tu es aujourd'hui, Ariane. La douleur fait évoluer tu sais. Regarde, quand on naît on souffre, quand on naît on crie.
Ariane, merci. »

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